Noël. Le jour que j'avais attendu avec autant d'impatience qu'un gamin allait enfin arriver; aujourd'hui, ç'en était la veille, et je trépignais à l'idée de la soirée que j'allais passer. Je la préparais depuis des semaines déjà et devais enfin effectuer le "sprint final": je me levai donc assez tôt, sautillant gaiement en me dirigeant vers la cuisine. J'avais décoré la villa entière de lumières et de guirlandes dorées, en plus de l'énorme sapin qui trônait dans le salon - j'avais bien cru que Bo allait faire une syncope en le voyant. Je déjeunai en vitesse, évitant bien sûr le café dans l'état où j'étais, avant d'enfiler mon manteau ainsi qu'une écharpe colorée pour me rendre en ville, où j'avais encore quelques trucs à acheter pour que tout soit parfait. Peut-être en faisais-je un peu trop, mais c'était à vrai dire la première fois que je célébrais cette si jolie fête. Étant plus jeune et vivant seul avec mon père, jamais cette journée n'avait été plus spéciale qu'une autre... De plus, j'allais passer la veillée avec mon meilleur ami, et, pour cette unique raison, les célébrations se devaient d'être mémorables. C'était pourquoi j'avais passé les derniers jours à cuisiner assez de desserts pour une armée entière, et qu'en revenant de ma tournée de Séoul, j'allais préparer quelques plats traditionnels dans l'ensemble simples à faire. J'aimais bien cuisiner; j'avais l'impression qu'allier ainsi les couleurs et les saveurs relevait d'un art complexe que je maîtrisais plutôt bien, sans vouloir me vanter.

Bo, qui dormait toujours à mon départ, était partit lorsque je reviens à la maison. À la fois déçu de devoir attendre à ce soir pour le revoir et content de pouvoir lui faire une si grande surprise, je me mis donc à l'ouvrage, et la journée passa tout de même rapidement, plus que je ne l'avais imaginé. C'est en sifflotant inconsciemment une mélodie saisonnière que j'allai retirer "l'horrible" pull de laine brodé de flocons que je portais depuis tout à l'heure pour enfiler les vêtements que j'avais achetés spécialement pour l'occasion, plutôt élégants, avouons-le. J'avais encore beaucoup de temps pour me préparer: je doutais fortement que mon ami allait se présenter avant l'heure, voire même à celle-ci... Oui, beaucoup de temps pour me préparer, mais plus rien à faire. Le repas attendait déjà sur la table, la bouteille de champagne était au frais, les lumières colorées scintillaient depuis un moment déjà, la radio crachait faiblement de vieux airs de Noël jazzés et j'étais, à mon avis, presque parfait pour accueillir Bo Yung. Que pouvais-je bien faire d'autre? Hum, rien, sans doute. J'attendis donc, m'asseyant sur le sofa, de plus en plus nerveux au fur et à mesure que les minutes s'écoulaient. Oh, j'avais tellement hâte qu'il voit tout ça! J'espérais plus que tout le rendre heureux, qu'il soit touché par toutes ces attentions... Et qu'il aime son cadeau, aussi. J'avais déniché, après de longues recherches et beaucoup d'argent, de vieux manuscrits originaux de quelques pièces de théâtre dont j'ignorais l'existence avant de les trouver, mais dont le destinataire aurait, je l'espérait, déjà entendu parler. Bref.
Plus que 5 minutes, j'allais mourir...